Le pôle Finance Innovation labellise des fintechs durables depuis sa création et est ainsi un observatoire des grandes tendances de la fintech durable.
Historiquement ces fintechs durables sont regroupées dans la filière Economie Sociale et Solidaire du pôle, parmi elles : Microdon (2011), Lumo (2012), Riskernergy (projet collaboratif avec Carbone 4 2012, devenue Beyond Rating), Equosphère, Wedogood et Yelloan (2015, deux « Fintechs de l’Année »), Lita.co (2015), Benoolend (2015), ZEI (2016), Solylend (2017), Ecotree (2017), Paygreen (2018) Commeon (2018), France Barter (2019)…
Petit à petit, en parallèle de cette vague de fintech sociale et solidaire, la « fintech verte » gagne les secteurs financiers plus traditionnels allant au-delà de l’ESS. La finance au service de l’environnement est souvent limitée à l’allocation des ressources via les sociétés de gestion d’actifs, car le secteur a saisi ces enjeux depuis plusieurs années (critères ESG, ISR…) et les fintechs aussi (Active Asset Allocation), mais de nombreux enjeux concernent l’ensemble des filières de la finance : de la banque (tendance récente des néobanques vertes Helios, Onlyone…), à l’immobilier (Qlay, Oze Energies) en passant par la finance d’entreprise (petites et grandes, tertiaire, secondaire ou primaire Reverdir) ou encore l’assurance (Descartes Underwriting « Insurtech de l’Année », « Lauréat Challenge Fintech for Tomorrow »). Cependant la maturité et la vitesse de croisière de ses fintechs est encore à atteindre, la plupart d’entre elles sont encore jeunes.
Globalement, le secteur de la finance durable prend progressivement de l’importance : ISR, Green Bonds, microcrédit, inclusion financière, une nouvelle page s’est ouverte peu de temps avant la crise avec la loi Pacte et la raison d’être des entreprises. Mais le secteur peine encore à se développer : trop novateur, trop risqué, pas assez rentable…
La crise économique actuelle tend à tordre ces idées. Trois constats ressortent : d’une part les entreprises seraient plus performantes lorsqu’elles prennent en compte des critères extra-financiers dans leur stratégie, d’autre part elles seraient plus résilientes face aux aléas économiques et environnementaux sur le court et le long terme, enfin ces fintechs durables permettraient de soutenir une grande partie de notre économie jusque-là mal adressée. L’inclusion financière (Finfrog avec le microcrédit, Finense avec les personnes âgées), le soutien des entreprises locales (Tudigo avec le financement participatif local), l’investissement dans des entreprises soucieuses des aspects extrafinanciers deviennent soudainement clés. Globalement, le secteur de la finance durable prend progressivement de l’importance : ISR, Green Bonds, microcrédit, inclusion financière, une nouvelle page s’est ouverte peu de temps avant la crise avec la loi Pacte et la raison d’être des entreprises. Mais le secteur peine encore à se développer : trop novateur, trop risqué, pas assez rentable…
Le soutien financier pour un modèle de société plus respectueux des enjeux environnementaux et sociaux dépend de nombreux facteurs : la réglementation en est un majeur, la volonté des acteurs économiques également mais l’équation n’est pas si simple. Ce sont des modèles économiques à réinventer en prenant compte des enjeux économiques étroitement liés aux enjeux sociaux et environnementaux qui eux étaient jusqu’alors peu intégrés et loin d’être maitrisés par les acteurs économiques. Les fintechs ont une réelle carte à tirer sur cette redéfinition des modèles : l’agilité de celles-ci avec les datas (pour orienter les décisions et les actions) ou l’administratif et le réglementaire en font des atouts non négligeables. Cependant, leur agilité ne suffit pas, l’histoire l’a montré jusqu’à présent : il faut également une conscience des acteurs économiques, un dialogue entre ceuxci et un soutien des politiques publiques. La conscience semble de plus en plus forte ce qui prépare un terrain bien propice pour ces fintechs durables.
La force de cette dynamique de fintech durable est la même que la fintech classique avec quelques années de décalage : les fintechs durables proposent des solutions à leur échelle et les acteurs traditionnels commencent à s’en emparer (rachat Kisskissbankbank par la Banque Postale, de Commeon par Hopenings) voire à développer leur propre outils (Peers de la Société Générale) et même les acteurs publics s’y impliquent : Mipise développe des plateformes de financement participatif pour les collectivités publiques, France Barter noue des partenariats avec les collectivités locales et d’autres discussions s’intensifient avec la crise entre acteur publics et fintechs pour une relance plus durable et résiliente.
Pour accompagner cette tendance, le pôle déploie différentes actions. Sortie d’une étude avec le cabinet Ailancy et une table ronde sur le rôle de cette finance durable dans la sortie de crise, durant le Fintech Community du 1er Juillet 2020. Ceci avant de lancer un groupe de travail pour déterminer les leviers à actionner pour accélérer la dynamique de l’écosystème. En parallèle, le pôle travaille avec Finance for Tomorrow à stimuler l’innovation financière au service de l’environnement avec le « Challenge Fintech for Tomorrow ». L’enjeu à présent est de soutenir également les acteurs plus matures et de structurer le marché en favorisant toujours plus les interactions entre les acteurs.
Ces derniers temps, les débats ont été âpres vis-à-vis des milliards mis sur la table pour soutenir nos entreprises, notamment quant aux conditions liées aux versements des dividendes, des investissements environnementaux, du chômage partiel… des conditions sociales et environnementales clairement liées aux versements financiers. La pression est forte pour que cette relance se fasse pour une société plus durable. La difficulté n’est aujourd’hui pas forcément de convaincre de cette nécessité (même s’il reste du chemin) mais aussi d’en trouver les moyens. C’est peut-être l’occasion de se poser sur ces outils que proposent les fintechs ? Les directeurs financiers, les trésoriers, les comptables peuvent eux aussi s’emparer de ces outils et ainsi contribuer à un cercle vertueux embarquant avec eux les entreprises, les institutions financières, les pouvoirs publics et les citoyens.
À titre d’exemple, plusieurs leviers s’offrent aux financiers d’entreprise. Le premier repose sur la supply chain : revoir le fonctionnement des entreprises au niveau des fournisseurs en les identifiant comme RSE compliant (ou non) avec Abcsr, ou encore en conditionnant le financement de stock par une politique RSE importante avec Champollion Finance ; réaliser des gains économiques en valorisant des déchets comme le propose Eqosphere depuis 2014 ou son concurrent Phenix à toutes les sociétés d’optimiser les process de revalorisation de tous types d’invendus.
Le deuxième levier repose sur l’allocation des ressources pour financer les investissements tournés vers la transition comme le proposent plusieurs plateformes de crowdfunding (Lendosphère, Lumo…).
Enfin un troisième levier, et non des moindres, concerne les indicateurs : comptables (Compta Durable) ou d’investissement (Trendeo) pour appuyer les décisions des directions financières.
Les idées des fintechs émergent pour favoriser une société plus durable, d’autres sont à créer mais il faut également que les bénéficiaires s’en emparent. C’est là tout le rôle du pôle : faire émerger des nouveaux projets (appel à projet du pôle ouvert jusqu’au 16 novembre) les faire connaitre au sein du monde de la finance et aux sein des autres secteurs et favoriser ainsi les synergies inter-secteur.
Christine GARDIES, Chargée de mission Métiers du Chiffre PÔLE FINANCE-INNOVATION
Maximilien NAYARADOU, Directeur Général PÔLE FINANCE-INNOVATION